Temps critiques #13

Le capitalisme, un sens du monde

, par Yves Dupeux

Il me semble moi aussi, comme vous le dîtes au début de « Soubresauts » (p. 3), que les États-Unis ne dominent plus le monde sous la forme de « l'impérialisme américain ». Si tel est bien ce que montrent les événements récents, cela n'exclut cependant pas, pour les États-Unis, la prédominance d'un « intérêt », dont on ne sait pas encore jusqu'où il sera poussé. Mais rien ne dit que cet intérêt soit « national » et en tout cas croire que les États-Unis ressortiront grandis en leur identité nationale de ces événements me semble être un leurre. Je ne sais pas si on est passé à « L'Empire ». Je ne peux pas le dire d'abord parce que je n'ai pas lu le livre de Hardt et Negri. Par ailleurs je ne sais pas si le terme « Empire » convient à la situation actuelle. Il me semble que pour l'Empire le tout est à faire, reste à faire et donc est toujours en reste, alors que le capitalisme est déjà un sens du tout, même si cette totalité n'est pas réellement accomplie. Le capitalisme est une (idéo)logique fermée sur soi, ce qui exclut nullement qu'elle ouvre à son tour autre chose-une « logique mondiale », c'est-à-dire une logique qui constitue un sens du monde, tandis que pour l'Empire le monde est à conquérir. Je m'arrête là parce que je n'ai pas les données du problème pour aller plus loin. Pourtant, J. W ne disait-il pas lui-même qu'avec le concept de « reproduction » il faut bien que le tout soit déjà atteint. En outre je disais que ce à quoi on assiste est en quelque sorte une « guerre civile mondiale ».